En tant que Français, on désir pour beaucoup voir l’équipe de France tout d’abord battre l’Espagne mardi en demi-finale de L’Euro, puis triompher en finale (contre les Anglais ou les Hollandais). Mais doit-on vraiment souhaiter ce scénario ?
Pour être honnête, je n’ai pas toujours supporté la France. A la Coupe du Monde 98 (qui avait lieu en France) par exemple, mon petit frère et moi, respectivement âgés de 10 et 14 ans, supportions le Brésil (et notamment Ronaldo !) qui à nos yeux symbolisait Le Football, c’est-à-dire une équipe technique, puissante et dansante (vous souvenez-vous des passements de jambes endiablés de Denilson ?).
Les Bleus, à l’époque, s’appuyait déjà avant tout sur une assise ultra défensive (Blanc, Dessailly, Thuram, Lizarazu, Deschamps, Petit, Karembeu, Viera…) mais on le leur pardonnait car la France n’avait alors jamais gagné de titre mondial ; l’important était avant tout de débloquer le compteur.
Cette consécration, plus qu’une première étoile sur le maillot français, a profondément modifié le jeu lui-même puisqu’elle a fait des émules et inspirée bon nombre d’autres nations qui ont choisi, comme leur nouveau modèle français, de bétonner et de croire dans une ultra efficacité offensive ou la fortune pour l’emporter – le Portugal à L’Euro 2016 par exemple. De cette conception, s’est dessinée toute une politique de formation de joueurs où les grands-costauds étaient le profil le plus recherché – Antoine Griezmann par exemple, faute de répondre à ces critères, a dû s’exiler en Espagne à 13 ans.
Ne vous y trompez pas, la demi-finale de mardi est plus qu’un simple match. De son résultat découlera le type de football qui nous sera offert sur la prochaine décennie. Et si la France l’emporte, tout l’écosystème du football en pâtira.
Didier Deschamps, capitaine de cette équipe victorieuse en 98 et sélectionneur des Bleus depuis douze ans ne voit le football que par le prisme de « On ne prend pas de but et on en aura au moins une à mettre au fond ! » ; il a quand même réussi l’exploit avec sa pensée minimale à atteindre ces demi-finales sans que son équipe n’ait marqué le moindre but dans le jeu (un pénalty de Mbappé en poule et un but contre son camp de la Belgique en quart).
Si les Bleus remporte cet Euro, davantage de sélectionneurs (Southgate à la tête de l’Angleterre a déjà avouer s’inspirer de Deschamps), d’entraineurs de clubs, d’éducateurs prendront le pas de cette philosophie très pauvre voir archaïque proposée par la France et le résultat pour nous spectateurs, sera des matchs horribles à regarder, sans idée, sans folie… sans jeu.
Quant à notre adversaire de mardi, L’Espagne, qui sur les bases du Barcelone flamboyant de Guardiola a changé la vilaine trajectoire donnée au football par la France en 98, a dernièrement fait évoluer son style de jeu pour redevenir compétitif, en lui donnant plus de verticalité grâce à Lamine Yamal et Nico Williams sur les ailes tout en conservant de la possession via son métronome Rodri (là où le nôtre, Griezmann, est perdu en ce moment et ne semble plus vraiment faire partie des plans de Deschamps).
Voilà, je suis Français et j’aimerais voir la France gagner mais j’aimerais avant tout voir le football gagner et aujourd’hui Le Football prend les traits de l’Espagne ; donc pour mardi, au fond de moi, je ne peux m’empêcher de crier : allez (aussi) l’Espagne !
Go France! Really…
For French people, many of us want to see the French team first beat Spain on Tuesday in the semi-final of the Euro, then they want them to triumph in the final (against the English or the Dutch)—but should we really want this scenario?
To be honest, I haven’t always supported France. In the 98 World Cup (which took place in France), my little brother and I, aged 10 and 14 respectively supported Brazil (and especially Ronaldo!) who in our eyes symbolized Football. They were a technical, powerful and dancing team (do you remember Denilson’s wild leg passes?).
At the time, France was already relying primarily on an ultra-defensive base (Blanc, Dessailly, Thuram, Lizarazu, Deschamps, Petit, Karembeu, Viera, etc.) but they were forgiven for it because France had never won a world title; the most important thing was to get the score off the ground.
This consecration, more than a first star on the French jersey, profoundly changed the game itself. It inspired many other nations who chose, like their new French model, to solidify and believe in ultra-effective attacking or fortune to win – Portugal at Euro 2016 for example. From this conception, a whole policy of training players was drawn up where big, strong guys were the most sought-after profile – Antoine Griezmann for example, for failing to meet these criteria, had to go into exile in Spain at the age of 13.
Make no mistake, Tuesday’s semi-final is more than just a match. Its outcome will determine the type of football we will be offered over the next decade. And if France wins, the whole football ecosystem will suffer.
Didier Deschamps, captain of this victorious team in 98 and coach of the Blues for twelve years, only sees football through the prism of “We don’t concede a goal and we will have at least one to put in the net!.” He still managed football with his minimal thinking to reach these semi-finals without his team having scored a single goal in the game (a penalty by Mbappé in the group stage and an own goal by Belgium in the quarter-finals). If France wins this Euro, more coaches like Southgate, the head of England has already admitted to being inspired by Deschamps. Club coaches, educators will take the step of this very poor, even archaic philosophy proposed by France and the result for us spectators. It will be horrible matches to watch, without ideas, without madness… without play.
As for our opponent on Tuesday, Spain, who on the basis of Guardiola’s flamboyant Barcelona changed the ugly trajectory given to football by France in 98. He has recently changed its style of play to become competitive again, by giving it more verticality thanks to Lamine Yamal and Nico Williams on the wings while maintaining possession via his metronome Rodri (where ours, Griezmann, is lost at the moment and no longer seems to be part of Deschamps’ plans).
So, there you go, I am French and I would like to see France win but above all I would like to see football win and today Football is taking on the features of Spain; so for Tuesday, deep down, I can’t help but also shout Go Spain!